Temps libre, soleil et dessert.











Hier j'ai passé une journée délicieuse à ne rien faire d'essentiel et l'exploit méritait bien un post circonstancié et passablement inutile ! On va commencer par la première mi-temps allant du réveil jusqu'au déjeuner.

8 heures, je me suis réveillé tout d'abord d'excellente humeur, avant même d'avoir bu mes deux bols de café noir (1/4 de litre chacun), complété par du muesli arrosé d'un jus de pamplemousse pressé.

Déjà là, on était pas loin du miracle, car habituellement, j'ai le réveil comateux avec les paupières gonflées, le cheveu rebelle et électrique et l'haleine sauvage digne d'un castor du Grand Nord. Je vous passerais les détails du rituel de la douche où je me suis surpris moi même à chanter "Singing in the rain" tout en éclaboussant abondamment la faïence de la salle de bains, étant définitivement fâché avec les rideaux de douche qui me rendent claustrophobe (déjà que j'ai la réputation d'être un peu dérangé alors inutile d'aggraver les symptômes). Un bonheur n'arrivant jamais seul en allant chercher le courrier, que j'avais oublié de prendre dans ma boîte aux lettres la veille, je tombe nez à nez dans le hall avec une créature brune (ouiiii une fille !) totalement inconnue, qui me lance avec une oeillade coquine un sympathique "bonne journée", avant de gravir l'escalier en un subtil déhanchement insolent, et j'ai failli retourner à la maison prendre une deuxième douche. Oui, inutile de m'accabler un peu plus, je sais bien que je suis un être lubrique totalement zobsédé par le sexe et en plus je n'éteins même pas la lumière ! Le jeudi étant le jour ou je ne travaille pas, en fait le seul de la semaine, je franchis, allegro ma no troppo, la porte d'entrée, bien décidé à profiter de cette matinée lumineuse et ensoleillée pour aller manger sur le port un sorbet aux fruits à la Grand Rive (oui en plus je suis un morfale impénitent) qui est habituellement ma cantine du midi, quand mon frigo n'a pas eu la judicieuse idée de se remplir tout seul. Cet établissement, bientôt cinquantenaire, a l'immense avantage d'une certaine complaisance à mon égard, et des quelques soirées débridées où j'ai parfois cru bon de déclamer d'obscurs poèmes de mon cru, sous l'effet des redoutables Irish Coffees, dont je regrette, en général le lendemain, la quantité indéterminée que j'ai pu ingurgiter. À ma décharge, malgré ces rares moments d'égarements nocturnes, le personnel m'aime bien. Peut-être, parce que de toute façon, quoiqu'il arrive je reste courtois et que je tire la chasse d'eau après avoir vomi proprement dans les toilettes.

9 heures 30, en m'installant à l'extérieur pour profiter du soleil et du calme matinal pour commander mon dessert préféré, le vent fait virevolter, sous le store de la terrasse, ce que j'ai d'abord pris pour un banal bout de papier. Le truc finit par descendre, en de graciles mouvements circulaires, pour se poser, à deux mètres de moi, dans la jardinière qui délimite l'entrée du bar. Le serveur arrive, pose ma commande et le journal local avec un petit mot gentil et me laisse dévorer la divine coupe de fruits glacés. Tout en parcourant le quotidien pour savoir si, depuis la dernière lecture (il n'y a pas à dire j'ai vraiment une vie passionnante), le monde se serait aperçu que je suis un type 'achement cool, je décide d'aller rendre visite à André, qui habite à deux pas dans son appartement sous les toits, minuscule, mais avec une vue splendide sur la Tour St Nicolas. Et là, en enjambant la jardinière pour éviter de traverser la rangée de chaises et de tables, je m'aperçois que le papier gras prisonnier dans la verdure du bac est un billet de 100 euros ! J'avais pensé un court instant (de l'ordre du deux millième de seconde) m'enquérir du propriétaire possible de ce billet fugueur, mais comment faire pour identifier la personne ? Demander aux rares passants, avec le risque d'être pris pour un dingue, aller aux objets trouvés dont je ne connais pas l'adresse ? J'ai donc mis innocemment le numéraire dans ma poche de jeans, en espérant qu'André ne m'en voudrait pas trop de ne pas être passé le voir comme prévu.

13 heures deuxième mi-temps de la journée de la glande : après être passé successivement chez un bouquiniste et un traiteur, j'ai donc merveilleusement déjeuner d'un gratin de coquilles St Jacques aux petits légumes assorti d'une Charlotte aux framboises, tout en feuilletant d'un air satisfait un livre à tirage limité des Editions Skira sur le peintre Raoul Dufy qui me narguait (le bouquin hein ! pas le peintre il est mort le pôvre !) depuis plusieurs semaines.

17 heures, sorti d'une sieste digestive redoutable...tiens il me reste encore 20 euros et si j'allais boire un café au cybercafé du Gabut en attendant le retour de Xiao qui passera forcément par là en sortant de ses cours ?

20 heures 30, à la relecture de ce billet affligeant, un doute affreux s'installe d'un seul coup : ayant commis dans la même journée, successivement le péché de gourmandise, de vol, de trahison (sorry André) et de luxure (oui je n'en avais pas parlé, mais je vais pas tout vous dire non plus) les portes du paradis me seront fermés quand arrivera le jour de la grande faucheuse ? y a-t-il un numéro de digicode particulier et si non est-ce qu’en enfer on peut surfer en haut débit et aller faire le malin sur des sites wareZ ? Si quelqu'un a la réponse à au moins une de ces interrogations, et surtout la dernière, qu'il n'hésite pas à se manifester...

Jeu. - Février 10, 2005          



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